Le monde de demain est là
Sylvain Bonnet
Avril 2023
Une auteure singulière
D’origine danoise, Pia Petersen s’est installée en France et a publié un grand nombre de romans depuis une vingtaine d’années, chez Actes Sud ou Plon. Citons ainsi Une livre de chair ou Mon nom est Dieu. La Vengeance des perroquets est sorti l’année dernière dans la collection Equinox aux éditions Les Arènes et constitue, on va le voir, une expérience de lecture.
Pour l’amour d’Achille
Le prisonnier leur a demandé d’allumer les lumières, il leur a demandé à plusieurs reprises mais ils l’ignorent. Il a besoin de lumière. Il fait si noir et il discerne à peine sa main et il a besoin de la voir. C’est essentiel, une main. Et c’est son droit d’avoir de la lumière. Il suit le contour de sa main gauche du doigt de son autre main et il pense à demain. Il faudra être prêt, trouver le moyen de sortir d’ici.
Quelque part, un homme est retenu prisonnier, sans vraiment savoir pourquoi. Il a juste le droit à du papier et un stylo. Et il écrit des lettres à la femme qu’il aime, à l’extérieur. Ailleurs, une artiste nommée Emma a un tableau à faire, celui du très riche Palantir, magnat du numérique et gourou de la Silicon Valley. Elle est amoureuse d’un dénommé Achille qui préfère prendre de la distance avec elle, par rapport au travail qu’elle doit exécuter pour Palantir. Un travail comme un autre ?
Bloquée à Paris par le confinement, Emma n’a plus de nouvelles d’Achille, qui semble avoir disparu. Palantir semble avoir connu Achille dont il était amoureux (pour autant qu’un homme comme Palantir puisse avoir des sentiments). L’a-t-il fait enlever ? Il met la pression à Emma pour son tableau… Emma préfère en tout cas coller des pochoirs sur les murs de la ville, des messages pour Achille. Comment tout cela finira-t-il ?
Une expérience étonnante
Il faut lire La Vengeance des perroquets d’une traite pour bien comprendre les intentions de Pia Petersen. Il y a de l’amour dans ce livre, de l’angoisse aussi qui transparaît dans le portrait sans pitié des maîtres du numérique, croyants du Trans-humanisme, égoïstes et égotistes, voyant dans la pandémie une façon de prendre le pouvoir et de l’exercer comme un doux totalitarisme. Voilà un roman qui fait réfléchir.
Sylvain Bonnet