La téléréalité en question

MAROC HEBDO
Abdelhak Najib
Juin 2013

L’écrivain danoise, Pia Petersen signe un roman actuel sur le monde de la téléréalité.
Juste et à propos.

Quand la téléréalité s’invite dans l’univers fermé des Lettres, c’est une jubilation sous la plume de Pia Petersen. On sillonne alors les coulisses de ce type de show qui ont aujourd’hui envahi toutes les télévisions du monde. On assiste à des situations drôles, parfois inhumaines, d’autres fois. On parcourt également quelques pans cachés de ce jeu de pistes qu’est la vie des autres, mimée et étalée au grand jour.

Dans Un écrivain, un vrai, qui est aussi l’intitulé de cette émission de téléréalité, on fait la connaissance de Gary Montaigu, un écrivain qui vient d’être auréolé d’un prix prestigieux. Il se plie au jeu de la télé et accepte d’être la vedette de l’émission. C’est simple, sa vie se trouve chamboulée par cette équipe technique qui s’est installée chez lui pour filmer ses faits et gestes.
Le plus intéressant dans cette mise en abyme littéraire, c’est que les téléspectateurs qui suivent la vie créative de Gary ont la possibilité d’intervenir dans l’intrigue. Ils peuvent apporter leur grain de sel.

Descente aux enfers

On se demande comment un écrivain de ce calibre peut-il succomber aux sirènes de la téléréalité et de ses petitesses. Pour Gary, ce jeu peut certes lui donner plus de poids au sein de la communauté des éditeurs. Mais c’est un moyen qui peut s’avérer judicieux pour aider les gens à aimer la lecture.

Mais tout ne se passe pas comme Gary l’avait imaginé. Frayer avec le petit écran et ses multiples soubassements peut s’avérer fatal. Au bout de quelques mois, Gary n’arrive plus à rien écrire. Il sombre dans la dépression, ne quitte plus son domicile et baisse les bras.
Que s’est-il passé? Pourquoi une telle abdication après ce moment de gloire télévisuelle sans bornes?

Pia Petersen à travers cette descente aux enfers d’un écrivain de talent, pose une question importante: quelle place peut encore occuper un créateur dans une société régie par les artifices et les faux-semblants?

Si la réponse n’est pas tranchée dans Un écrivain, un vrai, il n’en demeure pas moins que pour Pia Petersen, un auteur se doit d’être au plus près de qui il est au fond. Ne jamais déroger à cette règle d’or qui est l’impératif éthique qui fait que les artistes sont une catégorie à part dans la société.

Ce sont eux qui en sont les témoins, souvent actifs, pour en juguler les dérapages et déjouer certains pièges liberticides.

Voilà donc un roman qui tombe à point nommé à un moment de l’histoire de la culture où le prêt-à-consommer a pris les devants de toutes les scènes reléguant les véritables artistes au second plan.